Développement des activités pétrolières en Arctique : études des polluants et de leurs impacts sur la biodiversité
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Développement des activités pétrolières en Arctique : études des polluants et de leurs impacts sur la biodiversité
Développement des activités pétrolières en Arctique : études des polluants et de leurs impacts sur la biodiversité
Jérôme Fort, Aarhus University, Denmark
L’Arctique apparait aujourd’hui comme un milieu particulièrement vulnérable à l’augmentation des niveaux de polluants dans l’environnement.
L’augmentation des zones libres de glace permet d’une part un développement rapide des activités pétrolières et gazières en Arctique. Pour exemple, les autorités Groenlandaises ont récemment autorisé l’exploration pétrolière dans des zones étendues du détroit de Davis. La côte est du Groenland, jusque-là relativement épargnée par les activités humaines, pourrait à son tour voir l’exploration offshore débuter prochainement. Le retrait des glaces permet également l’ouverture de nouvelles routes maritimes et zones de pêcherie praticables durant des périodes de plus en plus longues. L’ensemble de ces activités pourraient alors entrainer, en plus d’un risque de pollution majeure, une pollution chronique dans ces régions, menaçant de ce fait les espèces arctiques. Un des exemples frappant est celui des Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP), un groupe de polluants de la famille des Polluants Organiques Persistants (POP). Les HAP dans le milieu marin sont en effet directement liés aux activités pétrolières locales et leur concentration a ainsi augmentée dans les régions arctiques au cours des dernières décennies. Des études récentes ont mis en évidence que les HAP sont un des composants les plus toxiques du pétrole dû à leurs effets mutagènes, immunosuppresseurs ou de perturbateurs endocriniens observés à faibles concentrations dans les organismes. Leur augmentation dans le milieu marin en Arctique, combinée à leur faible biodégradation, pourrait donc avoir des conséquences importantes sur les différentes espèces de cette région. Cependant peu d’études se sont jusque-là attachées à examiner leurs concentrations et leurs effets sur les organismes arctiques, en particulier chez les prédateurs marins supérieurs.
D’autre part, l’Arctique fait également face à l’augmentation des niveaux d’autres polluants de manière plus indirecte, ces derniers étant transportés depuis les pays industrialisés jusqu’en Arctique par les rivières, les vents dominants ou encore les courants océaniques. Ces polluants se concentrent alors dans certaines régions, se transmettent le long du réseau trophique et affectent ainsi la majorité des espèces. On peut par exemple citer le mercure que l’on retrouve à des concentrations importantes en Arctique, particulièrement chez les espèces animales qui se trouvent au sommet des réseaux trophiques. Le mercure possède en effet la particularité d’être bioamplifié le long de la chaine trophique et de s’accumuler dans les tissus. Tout comme les HAP, il soulève de nombreuses inquiétudes environnementales de par sa forte toxicité à de faibles concentrations, toxicité qui pourrait s’ajouter à celle d’autres polluants. Ses niveaux en Arctique et chez certains prédateurs supérieurs continuent malgré tout d’augmenter et leurs effets sur les populations et in fine l’ensemble des écosystèmes pourraient être importants.
Dans ce contexte, il apparait donc urgent d’améliorer notre compréhension du risque que présente en Arctique l’augmentation des niveaux de polluants liés aux activités humaines dans le milieu marin (et notamment les activités pétrolières) pour la biodiversité. Grâce à un réseau pan-Arctique, le groupe de travail AMAP (Arctic Monitoring and Assessment Program) suit depuis plusieurs années l’évolution des concentrations de divers polluants dans les organismes vivants afin de mieux comprendre leur dynamique dans le milieu. Cet effort doit être prolongé en se focalisant notamment sur les prédateurs supérieurs qui pourraient être les plus exposés et les plus touchés par l’augmentation des pollutions en mer, et en adoptant une approche communautaire. Il est également essentiel de définir les effets de ces polluants sur l’écophysiologie, la valeur sélective ou la distribution de ces espèces. De telles études permettront de mettre en place des mesures de conservation adaptées parallèlement au développement des activités pétrolières en Arctique.
Jérôme Fort, Aarhus University, Denmark
L’Arctique apparait aujourd’hui comme un milieu particulièrement vulnérable à l’augmentation des niveaux de polluants dans l’environnement.
L’augmentation des zones libres de glace permet d’une part un développement rapide des activités pétrolières et gazières en Arctique. Pour exemple, les autorités Groenlandaises ont récemment autorisé l’exploration pétrolière dans des zones étendues du détroit de Davis. La côte est du Groenland, jusque-là relativement épargnée par les activités humaines, pourrait à son tour voir l’exploration offshore débuter prochainement. Le retrait des glaces permet également l’ouverture de nouvelles routes maritimes et zones de pêcherie praticables durant des périodes de plus en plus longues. L’ensemble de ces activités pourraient alors entrainer, en plus d’un risque de pollution majeure, une pollution chronique dans ces régions, menaçant de ce fait les espèces arctiques. Un des exemples frappant est celui des Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP), un groupe de polluants de la famille des Polluants Organiques Persistants (POP). Les HAP dans le milieu marin sont en effet directement liés aux activités pétrolières locales et leur concentration a ainsi augmentée dans les régions arctiques au cours des dernières décennies. Des études récentes ont mis en évidence que les HAP sont un des composants les plus toxiques du pétrole dû à leurs effets mutagènes, immunosuppresseurs ou de perturbateurs endocriniens observés à faibles concentrations dans les organismes. Leur augmentation dans le milieu marin en Arctique, combinée à leur faible biodégradation, pourrait donc avoir des conséquences importantes sur les différentes espèces de cette région. Cependant peu d’études se sont jusque-là attachées à examiner leurs concentrations et leurs effets sur les organismes arctiques, en particulier chez les prédateurs marins supérieurs.
D’autre part, l’Arctique fait également face à l’augmentation des niveaux d’autres polluants de manière plus indirecte, ces derniers étant transportés depuis les pays industrialisés jusqu’en Arctique par les rivières, les vents dominants ou encore les courants océaniques. Ces polluants se concentrent alors dans certaines régions, se transmettent le long du réseau trophique et affectent ainsi la majorité des espèces. On peut par exemple citer le mercure que l’on retrouve à des concentrations importantes en Arctique, particulièrement chez les espèces animales qui se trouvent au sommet des réseaux trophiques. Le mercure possède en effet la particularité d’être bioamplifié le long de la chaine trophique et de s’accumuler dans les tissus. Tout comme les HAP, il soulève de nombreuses inquiétudes environnementales de par sa forte toxicité à de faibles concentrations, toxicité qui pourrait s’ajouter à celle d’autres polluants. Ses niveaux en Arctique et chez certains prédateurs supérieurs continuent malgré tout d’augmenter et leurs effets sur les populations et in fine l’ensemble des écosystèmes pourraient être importants.
Dans ce contexte, il apparait donc urgent d’améliorer notre compréhension du risque que présente en Arctique l’augmentation des niveaux de polluants liés aux activités humaines dans le milieu marin (et notamment les activités pétrolières) pour la biodiversité. Grâce à un réseau pan-Arctique, le groupe de travail AMAP (Arctic Monitoring and Assessment Program) suit depuis plusieurs années l’évolution des concentrations de divers polluants dans les organismes vivants afin de mieux comprendre leur dynamique dans le milieu. Cet effort doit être prolongé en se focalisant notamment sur les prédateurs supérieurs qui pourraient être les plus exposés et les plus touchés par l’augmentation des pollutions en mer, et en adoptant une approche communautaire. Il est également essentiel de définir les effets de ces polluants sur l’écophysiologie, la valeur sélective ou la distribution de ces espèces. De telles études permettront de mettre en place des mesures de conservation adaptées parallèlement au développement des activités pétrolières en Arctique.
Jerome Fort- Messages : 2
Date d'inscription : 07/03/2013
Localisation : Aarhus University, DK
Re: Développement des activités pétrolières en Arctique : études des polluants et de leurs impacts sur la biodiversité
Bonjour M. Fort,
Votre article est très intéressant. Suite à la lecture de celui-ci, une brève question me vient en tête:
Travaillant principalement sur le phytoplancton, l'impact des divers facteurs sur les producteurs primaires m'intéresse particulièrement. Vous parlez principalement des prédateurs supérieurs qui seront plus exposés à ces polluants, mais un impact considérable pourra-t-il aussi être perçu au niveau du phytoplancton, qui est à la base des réseaux alimentaires?
Merci beaucoup,
Pierre-Luc Grondin
UMI Takuvik, Université Laval
Votre article est très intéressant. Suite à la lecture de celui-ci, une brève question me vient en tête:
Travaillant principalement sur le phytoplancton, l'impact des divers facteurs sur les producteurs primaires m'intéresse particulièrement. Vous parlez principalement des prédateurs supérieurs qui seront plus exposés à ces polluants, mais un impact considérable pourra-t-il aussi être perçu au niveau du phytoplancton, qui est à la base des réseaux alimentaires?
Merci beaucoup,
Pierre-Luc Grondin
UMI Takuvik, Université Laval
Pierre-Luc Grondin- Messages : 1
Date d'inscription : 17/04/2013
Echelons trophiques et pétrole en Arctique
Bonjour,
Les organismes majoritairement capables de dégrader naturellement les polluants organiques, et notammeent les HAP, sont les bactéries. Plusieurs équipes (dont la nôtre ) s’intéressent à la fois à l'impact de ces polluants sur la diversité des communautés bactériennes mais également à leur capacité de remédier à ces pollutions, notamment via des ajouts de nutriments qui sont généralement limitant pour la dégradation de ces polluants (biostimulation par levée du contrôle bottom-up). Au-delà de nos travaux en zones tempérées, nous avons abordé essentiellement cette question en zones Antarctique et sub-Antarctique. Nous avons remarqué l'importance de prendre en compte non seulement la limitation par les ressources (bottom-up) et différents facteurs physique (température, salinité, lumière, couverture de glace, etc...), mais également par leurs prédateurs (virus et flagellés) pour évaluer l'impact des polluants organiques sur le compartiment bactérien. Comme le signale PL Grondin avec l'importance des producteurs primaires, cela nous amène à penser que des études les plus intégratives possibles, incluant différents échelons trophiques, sont nécessaires si on souhaite aborder la question du devenir des contaminants chimiques et leur transformation en Arctique. Leur bioaccumulation dans les organismes supérieurs n'est pas suffisante pour comprendre les dynamiques de ces contaminants et leur devenir dans le milieu, qui touche aussi les petites bêtes qui ont un rôle essentiel dans les cycles biogéochimiques des éléments (voir "Microorganismes et cycle des éléments en Arctique" posté dans ce forum).
J'aurai plaisir à vous rencontrer prochainement pour discuter de ces aspects lors du colloque début Juin. Mais n'hésitez pas à me contacter avant si le coeur vous en dit .
Jean-François Ghiglione
LOMIC, Banyuls sur mer
Les organismes majoritairement capables de dégrader naturellement les polluants organiques, et notammeent les HAP, sont les bactéries. Plusieurs équipes (dont la nôtre ) s’intéressent à la fois à l'impact de ces polluants sur la diversité des communautés bactériennes mais également à leur capacité de remédier à ces pollutions, notamment via des ajouts de nutriments qui sont généralement limitant pour la dégradation de ces polluants (biostimulation par levée du contrôle bottom-up). Au-delà de nos travaux en zones tempérées, nous avons abordé essentiellement cette question en zones Antarctique et sub-Antarctique. Nous avons remarqué l'importance de prendre en compte non seulement la limitation par les ressources (bottom-up) et différents facteurs physique (température, salinité, lumière, couverture de glace, etc...), mais également par leurs prédateurs (virus et flagellés) pour évaluer l'impact des polluants organiques sur le compartiment bactérien. Comme le signale PL Grondin avec l'importance des producteurs primaires, cela nous amène à penser que des études les plus intégratives possibles, incluant différents échelons trophiques, sont nécessaires si on souhaite aborder la question du devenir des contaminants chimiques et leur transformation en Arctique. Leur bioaccumulation dans les organismes supérieurs n'est pas suffisante pour comprendre les dynamiques de ces contaminants et leur devenir dans le milieu, qui touche aussi les petites bêtes qui ont un rôle essentiel dans les cycles biogéochimiques des éléments (voir "Microorganismes et cycle des éléments en Arctique" posté dans ce forum).
J'aurai plaisir à vous rencontrer prochainement pour discuter de ces aspects lors du colloque début Juin. Mais n'hésitez pas à me contacter avant si le coeur vous en dit .
Jean-François Ghiglione
LOMIC, Banyuls sur mer
Ghiglione- Messages : 3
Date d'inscription : 03/04/2013
Impacts of Resource Extraction in the Arctic
I read with great interest these posts. You may also be interested to read the posts
under the theme "Anthropisation" which includes the impacts of pollution on
ecosystems as well as on air pollution and climate. Regulation of pollutants is also
discussed un the Governance theme, this time, mainly in relation to future shipping.
There are likely some very interesting synergies between the different contributions
that could be discussed at the Colloque in June.
Best regards,
Kathy Law
(LATMOS)
under the theme "Anthropisation" which includes the impacts of pollution on
ecosystems as well as on air pollution and climate. Regulation of pollutants is also
discussed un the Governance theme, this time, mainly in relation to future shipping.
There are likely some very interesting synergies between the different contributions
that could be discussed at the Colloque in June.
Best regards,
Kathy Law
(LATMOS)
kslaw- Messages : 6
Date d'inscription : 12/03/2013
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